• Enteteroulemaloute 5
  • 29 Avril 2017
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emm

Garde le sourire, ce sont les derniers emmerdeurs éthiopiens ! (touche pas ma sacoche, toi, là....)

Le Kenya par la (toute) petite porte

Pour passer de l’Ethiopie au Kenya, il y a 2 possibilités. Par Moyale, ou par Omorate. La première n’avait pas bonne réputation, à cause des sinistres Shebabs somaliens qui trainent parfois par là. Mieux vallait être barbu pour se promener dans le coin. Apparemment, la situation serait plus saine depuis quelques temps, mais puisque nous sommes du côté de l'Omo, il nous faudrait rebrousser chemin, ce qui ne nous intéresse pax trop. L’autre n’est pas forcément très recommandée non plus, car il s’agit d’un itinéraire de pistes très sableuses. De plus, les tribus locales, Dasaneech éthiopiens et Turkanas kenyans n’hésitent pas à se tirer dessus, pour des histoires d’accès à l’eau et de troupeaux. Vivant comme autrefois, se tuant comme autrefois pour un peu d’herbe à pâturer, de l’eau ou une chèvre égarée, armés de kalachnikov, comme les Hamers, qui sont eux beaucoup plus paisibles. Mais comme nous n’avons ni troupeau ni look tribal, et que notre silhouette pataude sur nos drôles de montures ne peut prêter à confusion, nous devrions nous en tirer.

Ethiopie /Kenya : entre les 2, ça coince un peu.

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garde le sourire, il parait que ça va durer 140 km

Ça y est, nous ne sommes plus des farenje, nous enfilons notre costume de Muzungu. Ça veut toujours dire “blanc” (et, cela va de soi, riche !), mais cette fois en Swahili. Le 1er Décembre, sur le coup des 10h nous franchissons la petite douane kényane de Todanyang. C’est un sableux No Man’s Land de 11 km que nous venons de traverser ce matin, en 3 heures. Oui, 11 km en 3 heures, à tenter de vaincre les bourrasques et à pousser le vélo dans le sable profond. Vous ne vous imaginez pas la joie d’entendre un « welcome to Kenya » de la part des policiers qui suivaient notre progression aux jumelles. Progression lente et très pénible.

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borne rassurante

A un moment, dans ce no man’s land, on passe devant quelques huttes. Un jeune Dassanech s’approche, puis deux, puis trois, puis une véritable meute. A l’ image de tous les peuples de la vallée de l'Omo, le Dassanech est grand, fin, léger, taillé pour engloutir les kilomètres. Depuis la nuit des temps, le Daasanech marche sous le soleil, il n’a pas le choix. Il est maigre comme un clou, il n’a pas le choix, il n’y a rien à bouffer par ici, tout n’est que sable et quelques herbes rabougries. Vers sa dixième année, un court pagne couvre ses hanches, certains héritent d'un fouet pour conduire quelques chèvres faméliques. Dès le plus jeune âge, les filles recouvrent le bas de leur corps et exhiberont, durant toute leur existence, une poitrine dénudée. Des seins magnifiques, éphémère beauté. Les voici donc, ces Daasanech, en pleine forme et nombreux, et nous deux, déjà bien consumés par les efforts matinaux. Ils sont adaptés à cette chaleur, au sable, à ce vent de merde, pas nous. Ils ont bien compris notre faiblesse et commencent à vouloir essayer les vélos, ils se ramassent la gueule...., puis pousser les vélos, en nous faisant comprendre que le Kenya…c’est encore loin…. On est bien d’accord pour qu’ils poussent les vélos, mais on les prévient : ne rêvez pas , il ne nous reste pas de birhs. (les gamins ethiopiens n'arrêtent pas de réclamer de l'argent, en général) . échapper au poussage, quelle chance.

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Ce sont donc les gamins qui poussent comme des dingues pendant un ou deux kilomètres, puis nous laissent en plan, les adultes qui marchent à nos côtés prétextent qu’à partir de là, ils risquent de se faire tirer dessus par les turkanas (la tribu kenyane ennemie). Peur fondée ou pas, on n’insiste pas, on sait qu’ils sont un peu maboules dans le coin. Nous reprenons nos vélos et notre chemin de croix. Ils reprennent la direction de leur hutte précaire. Arrivés donc au poste kenyan, nous sommes invités à prendre un repos bien mérité à l’ombre, et on se voit confirmer que si l’armée est là, c’est pour empêcher les 2 populations ennemies de s’entretuer. Soudain, la providence se présente, elle s’appelle John. John est policier et nous invite à monter à bord du 4x4. Il va faire une patrouille, nous faisant économiser quelques forces pour la suite. Nous en aurons besoin, car plus loin, c’est toujours la même galère, rouler un peu, pousser beaucoup. Arrivés au village de Lowarengak, nous sommes à l’agonie, Katia et sa famille somalienne nous installent un lit dans la cour, nous serons un peu ventilés cette nuit nous dit elle.

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chez Katia, au fond, notre chambre...

La chaleur est atroce, plus de 40 degrés, c’est sûr, 45 ? On se boit un coca, il est bouillant, et on mange des chapatis (galettes de farine et d’eau, cuits, puis frits), ils sont gorgés d’huile. Journée de merde. On en rigole en s’allongeant sur nos paillasses et ce sont des coqs bien en forme qui nous tirent de nos rêves. La nuit a été chaude, peu récupératrice, mais il va être 6 h, l’heure de décamper, rouler, pousser, rouler, pousser, avant que le soleil ne soit trop haut. Ici, à la mi journée, tout brûle, même l’ombre est torride et le vent incandescent. Cette piste est une misère, nous ne la conseillons pas à nos pires ennemis. Les villageois nous apprennent qu’on aurait trouvé du pétrole dans le coin, alors, cette piste, dans quelques années, sera probablement goudronnée, les cyclistes raconteront qu’ils ont bien roulé sur un bel asphalte, dormi dans une belle chambre, bu du coca bien frais et mangé une bonne pizza. Tout fout le camp !