• Enteteroulemaloute 5
  • 29 Avril 2017
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Todonyang, la mission tombée du ciel.

30 Octobre, nous entrons au Kenya par la petite porte, c'est-à-dire une frontière où personne n'a de tampon à apposer sur votre passeport. En revanche, au sens géographique du terme, elle est grande cette porte, puisqu'il n'y a aucune marque, aucun grillage, aucun signe, du sable partout autour de vous. Vous savez que vous entrez au Kenya car un camp militaire est installé. Bien entendu interdiction formelle de prendre des photos mais la photo suivante, prise quelques km avant, donne une idée du lieu.

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Donc, après cette frontière, après une dizaine de kilomètres, surgit une mission, Todonyang. Au Kenya, les cathos ont le chic pour construire leurs missions dans des lieux improbables. Le curé Andrew, Kenyan, nous installe dans ce qu'il appelle une tente, nous on appellerait ça une case, bref, c'est plutôt pas mal.

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Dans la nuit, le ciel est déchaîné, il dégringole des hl de pluie, ce qui va rendre la suite du parcours un peu complexe.

Pour échapper à toute cette flotte par terre et toute cette boue, nous passons dans les hautes herbes, ce qui au final rend notre parcours assez esthétique. C'est ainsi que nous gagnons Lowarengak, trou du cul du monde. Malheureusement Katia la somalienne à déménagé pour études. Quelle idée ! C'est Maclevis (ça ne s'invente pas un prénom pareil) qui nous prépare très gentiment une chambre, spartiate mais bien proprette. Et un beau poisson au repas. Seul bémol, son putain de canard vient nous piquer l'omelette du petit déjeuner. À cause de ce louper, il n'aura pas sa 3ème étoile au Michelin. Dommage, ma pauvre Lucette.

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Nous traversons de petits hameaux baignés de soleil. La nuit suivante, nous la passons à Nariokotome. Mission catholique espagnole établie depuis 1993 et où vit Patrizia arrivée d'Italie il y a 25 ans et qui n'est jamais repartie. Une chambre, à boire pour des cyclistes assoiffés , à manger pour des ogres sur roues. Nous avons été tellement bien accueillis lors de notre 1er passage ici en 2016 que nous tenions à revenir. Il faut voir le travail qui a été fait, jardinage, scolarisation, dispensaire et cantine pour plus de 200 enfants. Nous nous installons quelques jours. Merci Patrizia, Lenny, Liliane, vous nous avez bien dorlotés. Sans parler de Geoffrey, bref, que de belles personnes.

 

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 Comment voulez vous que je m'en sorte.. Je dois écouter l'instit, tout en m'occupant de son bébé, recopier le tableau et en plus, il y a des Muzungu (blancs) dans la classe.

 

 Je ne sais pas s'il existe un classement des itinéraires les plus difficiles à vélo, mais honnêtement, celui ci devrait être dans le top ten.
Pas la pente, c'est plat comme le dos d'une limande, mais à cause le l'isolement, de la chaleur et bien sûr du sable. Je pense qu' il est plus facile de grimper un col himalayen que de parcourir cette piste. Contre la chaleur, on a la parade, c'est casquette mouillée sous le casque et linge mouillé devant la bouche. Et on mouille régulièrement, on transporte beaucoup d'eau, donc pas de problème à ce niveau. Par contre, on ne transporte comme bouffe que du pain et 1 litre de miel. Alors on fait des pauses régulières pain miel à l'ombre des acacias.

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Contre le sable, pas de solution. tu roules, tu pousses, tu roules et tu repousses. Du sable, des acacias, des troupeaux de chèvres pas bien grasses, des petits hameaux qui ne respirent pas la richesse. Où est le plaisir me direz vous?
Dans cette situation, on évite de se poser des questions philosophiques, on ne pense qu'à  avancer, doucement, mais avancer. Et si possible, garder sa bonne humeur, même si à la fin de la journée on n'a parcouru que 30 km ! Évidemment, si on a la chance d'être un couple complice avec la même passion pour ce type de parcours, ça aide 😁

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Et puis, il y a l'épisode "Brizen", c'est un pote de Patrizia. "allez dormir chez lui, il est super sympa"
Alors oui, Brizen est super sympa, mais quand on se pointe chez lui (une maison au milieu de rien..), il n'y est pas. Nous attendons patiemment, mais ne voyant rien venir, à part la nuit, nous posons la tente sur la terrasse. Quand il arrive, vers 11h ou minuit, il nous accueille chaleureusement et insiste pour nous faire un repas : patates, tomates et bananes, tout cuit ensemble, c'était délicieux, sauf qu'à cette heure là, on n'avait pas vraiment envie de manger.
Qu'elle serait votre réaction, à vous, chers lecteurs, si à minuit vous trouviez des cyclistes (noirs en plus...) entrain de roupiller sur votre terrasse ?

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Super petit déjeuner le lendemain et voilà que Brizen nous raconte que la veille, il a hébergé le prince Ludwig de Bavière en personne car ils sont entrain de construire des écoles, le prince étant très impliqué dans des projets éducatifs en Afrique de l'est. Imaginez, à un jour près, on se retrouve ici avec Ludwig de Bavière. Pas de chance ma pauvre Lucette ! Mais merci Brizen pour ton accueil chaleureux. 

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La suite de la piste est toujours terrible, mais petit à petit, on arrive à Kalokol. On arrive défaits, on n'a qu'une envie, de l'ombre ! Du coup, on n'a même pas le courage d'aller au lac, pourtant pas très loin... Mais on se fait un petit restau sympa, avec bon poisson du lac. Le précédent remonte à 2 jours, dans un petit hameau, on a mangé du poisson avec de la polente, mais envahi de mouches !!!
Généralement, à l'heure du repas de midi, on est dans la pampa, on se contente de pain, sec maintenant et de miel. On en a acheté 1 litre en Éthiopie, il faut qu'il dure jusqu'au bout de la piste.... 

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Et puis, on trouve quelques cm de goudron... et puis, c'est Lodwar, LA Ville. Mouais... La mission Ste Térésa ayant été endommagée par les pluies, nous nous rabattons dans une autre mission, Bethany, où nous sommes remis aux bons soins de sœur Emmanuelle. Clim, wi fi, bonne bouffe, possibilité de laver notre linge, tout ce qu'il faut au cycliste fatigué. La mission est un peu excentrée, nous partons en ville à pied pour faire quelques courses, avocats, tomates et fruits, voilà des lustres que nous n'avons mangé ni fruits ni légumes. Je m'achète une chemise Zara homme d'occasion, (la mienne est trop chaude), je la fais retailler, et un pantalon léger, j'en ai pour 4 euros l'ensemble, inclus le coût de la couturière. Elle est trop drôle, elle nous dit n'être ni riche ni pauvre, mais qu'elle est riche en Jésus Christ. Les curés ont bien travaillé. Il y a des missions un peu partout dans ce pays, des cathos et plein d'autres aussi.

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Ah les rencontres. Au final, selon nous, il n'y a presque cela qui compte en voyage ! Ces 2 gars là, ils m'ont vraiment fait rire, le 1er à cause de ses lunettes, et le 2ème parceque sa chèvre refusait d'avancer sur la piste. J'aime prendre mon temps pour quelques paroles avec ces gens du désert. Même si on ne parle pas la même langue, on arrive toujours à échanger un minimum, parfois c'est juste un sourire, mais il illumine toute notre journée. 

Lokichar

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Nos héros sont morts ce soir.
(C'est un film dramatique français écrit et réalisé par David Perrault et sorti en 2013)

Croyez nous, quand nous arrivons à Lokichar, nous n'avons rien de héros, nous sommes cuits. Aujourd'hui, le compteur a encore affiché 40 degrés à l'ombre. 

Nous repartons pleins d'espoir car du goudron est annoncé, mais il faut se rendre à l'évidence, tout est encore en travaux... 

Nous commençons à grimper le col marich Pass, col que nous avons déjà à notre actif. Au fur et à mesure de l'ascension,  le soleil devient piquant, signe d'un probable orage.

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Encore quelques km, le ciel s'obscurcit et la température chute d'un coup. Un camion nous propose un lift.

 

 

Nous voici voyageant tout confort avec Ramadan, Duke et Éric, 3 gars fort sympathiques. Bien nous en a pris, l' orage éclate, et je vous le dis, vu de la cabine d'un camion, un orage n'a pas la même gueule que vu depuis la selle de son vélo ! ☔☔☔☔☔🙏🙏🙏

 

 

Nous reprenons les vélos et arrivons à Kitale. Et là, nous ne savons pas si nous allons retrouver Georges : "ma petite entreprise connaît pas la crise" Mais oui, il circule toujours dans le même quartier. 
🎼🎶 Tellement heureux de nous retrouver. Il y a 3 ans, il vivait dans la rue et nous l'avions aidé à monter une petite affaire de vente d'oeufs durs sur les marchés. Il vend toujours ses œufs, a maintenant des papiers d'identité, un toit, un téléphone, il est habillé nickel,  a récupéré une copine qui a 2 enfants. Plutôt qu'il nourrisse tout le monde, après une bonne discussion avec Georges et Sara, il est convenu qu'elle doit se mettre au boulot. Cette fois, nous achetons pour Sara une grande casserole, de l'huile, des patates et un thermos. Le lendemain, c' est parti, elle vend du thé et des frites dans son quartier. Et ça semble bien marcher. Le quartier où ils habitent, c'est un bidonville, le genre d'endroit où un blanc ne met jamais les pieds. Maisons de terre, chemins de terre, latrines communes, un genre de "cité de la joie" de Dominique Lapierre, mais version africaine. 

Georges est aussi devenu visiteur de prison. Il nous propose de l'accompagner pour rendre visite à un groupe de femmes qu'il soutient. Nous ne sommes pas très chauds pour ce genre d'expérience, mais pour lui faire plaisir, nous l'accompagnons. Nous ne regretterons pas. Ces femmes se montrent enchantées de notre visite, nous passons un bon moment avec elles et sommes très surpris des conditions de détention. Elles font du sport, cultivent un potager, se font leurs repas. Les peines sont évidemment très variables, de quelques mois à plusieurs années. 2 sont là depuis 20 ans (condamnées à perpétuité). Leurs enfants, s'ils ont moins de 4 ans sont là aussi. L'une d'elle est particulièrement locace, elle est drôle, parle un anglais parfait. Elle a pris 2 ans, a déjà fait 6 mois, et "n'a jamais été si près de la sortie" nous dit elle dans un grand éclat de rire.
On ne ressort quand même pas indemnes de cette visite, mais sacrément perturbés.

 

Photos plus tard, connection trop lente